Les Carabins participent à une expérience sur l’entraînement du cerveau des athlètes

Montréal, le 5 juin 2013 – Dans l’obscurité d’un laboratoire de l’École d’optométrie de l’Université de Montréal, un joueur de soccer des Carabins est assis sur une chaise face à un écran blanc. Sur celui-ci, un joueur animé effectue aléatoirement des mouvements de passes dans toutes les directions. La scène pourrait être tirée d’un film de David Cronenberg, mais il s’agit plutôt d’une expérience qui vise à démontrer que l’entrainement des capacités perceptivo-cognitives améliore la prise de décision dans le sport.

Au cours d’une saison, les étudiants-athlètes des Bleus participent à plusieurs travaux de recherche qui peuvent porter sur différents sujets tels que les commotions cérébrales, la psychologie sportive ou encore le leadeurship. Cette fois-ci, les résultats de cette expérience pourraient permettre aux athlètes de sports collectifs d’améliorer leur jeu.

Thomas Romeas, un étudiant au doctorat en sciences de la vision, est l’un des rares chercheurs qui tentent de prouver que les capacités perceptivo-cognitives peuvent être entrainées et transférées sur le terrain pour accroitre la qualité de jeu d’un athlète.

Les athlètes de haut niveau passent beaucoup de temps à améliorer leurs aptitudes physiques. Ils peaufinent également leurs techniques de jeu ou d’exécution et surveillent leur alimentation. Cependant, l’entrainement du cerveau pourrait être l’un des facteurs qui permettent d’atteindre des sommets dans son sport et ainsi d’appartenir à l’élite. Cet exercice atypique pourrait améliorer la prise de décision et l’anticipation.

Pour réaliser ces travaux, une association avec les Carabins allait de soi. «Nous trouvions cela intelligent de le faire avec eux, dit Thomas Romeas, un grand amateur de sport. Je crois que c’est un bel exemple d’échange au sein de l’Université. Ensuite, j’ai choisi le soccer parce que c’est une discipline mondialement connue. C’est un sport d’action collectif où il faut prendre des décisions rapidement, alors ça collait très bien avec le projet.»

En effet, les Bleus sont toujours à la recherche de nouveaux moyens pour augmenter la performance des athlètes. De plus, ce projet soulève une question qui est primordiale parmi les entraineurs.

«C’est une certitude que les meilleurs joueurs analysent une situation de jeu plus vite et prennent de meilleures décisions, affirme l’entraîneur-chef de l’équipe de soccer féminin des Carabins, Kevin McConnell, qui a fait une maitrise sur le sujet. Les qualités physiques comme la vitesse, l’agilité ou la puissance sont importantes, mais moins toutefois que la prise de décision, surtout au soccer. C’est ce qu’on cherche le plus à améliorer lors de nos entrainements sur le terrain.»

L’entraineur-chef de l’équipe masculine, Pat Raimondo, croit aussi aux bienfaits d’une telle expérience. «En tant qu’équipe universitaire, ça fait partie de notre rôle de participer à ce genre de travaux, indique-t-il. Je crois que ce type d’entrainement peut aider nos joueurs sur le plan individuel. Il reste maintenant à voir comment on peut l’utiliser pour resserrer le jeu collectif.»

Une expérience possible grâce au NeuroTracker
Le NeuroTracker est un logiciel qui entraine le cerveau à gérer les informations reçues le plus rapidement possible. Le principe est simple. Sur un écran, huit balles jaunes sont en mouvement dans tous les sens. Lorsqu’elles s’arrêtent, quatre sont ciblées. Quand les mouvements reprennent, le sujet doit suivre ces quatre balles parmi les autres et les retrouver lorsque l’image s’arrête de nouveau.

Ce logiciel, mis au point par le directeur de recherche Jocelyn Faubert, professeur à l’École d’optométrie de l’UdeM, est à la base des travaux de Thomas Romeas. Au fil des études qu’il a menées, M. Faubert a constaté qu’il y aurait une intelligence propre aux sportifs. Ces derniers seraient plus aptes à analyser visuellement des scènes complexes.

Les équipes de soccer des Bleus ont été divisées en trois groupes. Un seul a pris part à des séances avec le NeuroTracker. Un groupe témoin a regardé des matchs de soccer en trois dimensions. Ces deux groupes se soumettaient ensuite à des séances où ils devaient anticiper les mouvements d’un joueur animé sur un écran géant. Puis ils ont été comparés avec le second groupe témoin. Les gestes de tous les joueurs ont été analysés durant des séances de jeu sur le terrain avant et après l’expérience par leurs entraineurs, qui ignoraient lesquels avaient fait partie de quel groupe.

L’expérience de Thomas Romeas est aujourd’hui terminée. Les résultats seront analysés au cours de l’été. Si l’entrainement du cerveau se traduit réellement par une amélioration dans les prises de décision sur le terrain, les Carabins pourraient avoir contribué à une avancée majeure dans le monde du sport.

Source : Mathieu Dauphinais, agent d’information sportive