Alexandra Boulanger, la recrue de 29 ans

Le sport nous offre à l’occasion de belles histoires de retour au jeu. Ces athlètes ayant déjà fait une croix sur leur sport, qui savourent à nouveau leur rêve.

Il y a neuf ans, Alexandra Boulanger réalisait un premier passage au niveau universitaire. Au tournant de la vingtaine, elle prenait la direction d’Halifax pour rejoindre les Huskies de Saint Mary’s lors de la saison 2008-09.

«Je voulais partir loin de Montréal pour vivre dans un nouvel environnement. Après ma première saison, j’ai décidé de revenir à la maison, explique la détentrice de sept points avec les Huskies. À l’époque, au niveau universitaire, si tu changeais d’établissement scolaire, tu étais bloquée pour un an. J’ai transféré à Concordia, mais le programme ne m’interpellait pas. En 2009-2010, je n’ai pas joué. Ensuite, j’ai fait un échange étudiant et la vie a pris le dessus. J’avais vraiment mis une croix sur le hockey.»

Six ans plus tard, à la fin de l’été 2016, elle retourne sur les bancs d’école. Elle contacte une joueuse qui en était à sa dernière saison, l’attaquante Cassandra Dupuis, afin de s’informer sur le programme hockey des Carabins.

« J’ai décidé de faire un changement de carrière et de retourner à l’école. Je voulais étudier en kinésiologie pour être réellement impliquée dans le sport. J’ai vu une opportunité de peut-être revenir au jeu », souffle l’auteure de trois points cette saison.

Au match d’ouverture local en 2016, Boulanger rencontre Isabelle Leclaire. L’entraîneure-chef de l’équipe hockey laisse l’étudiante Alexandra Boulanger prendre part à une séance d’entraînement avec les Bleues au cours de l’hiver. Depuis, elle est l’hockeyeuse universitaire la plus âgée foulant la glace du CEPSUM tous les jours. À la fin de la présente campagne, elle franchira le seuil de la trentaine.

« Je ne le sens pas vraiment, c’est ça le pire! Je joue beaucoup avec Kaleigh Quennec qui a dix ans de différence avec moi. Pour vrai, j’ai l’impression que c’est mon amie d’enfance et que nous avons le même âge. Par moment, ça me frappe et je me dis : “Voyons, qu’est-ce que je fais ici!?″ Ça n’a pas rapport, raconte-t-elle en riant. (…) Je suis un peu une blagueuse. Mon sens de la maturité n’est pas le plus élevé et je crois que ça aide à m’inclure avec des filles qui ont entre 18 et 25 ans. La complicité avec les membres de l’équipe s’est faite tellement rapidement. »

Si elle s’est facilement intégrée avec l’équipe, son expérience de vie lui permet d’avoir une aisance pour discuter avec le personnel d’entraîneurs.

Gravir un échelon à la fois

Son retour au jeu n’a pas été facile. L’attaquante recommence en 2013 à jouer dans une ligue de garage féminine qu’elle considérait très faible. L’année suivante, elle franchit une étape supplémentaire en évoluant avec des hommes.

« Je jouais avec l’assistant-entraîneur, Philippe Trahan. Notre équipe s’appelait les Looney Tunes, juste pour démontrer notre crédibilité, s’exclame-t-elle. Depuis trois ans, je jouais deux à trois fois semaines. »

Cet été, les séances d’entraînement sur glace sont réapparues à l’agenda. Elle avoue avoir réalisé l’ampleur de son retour à ce moment.

« Avant, j’étais toujours la première en ligne lors des pratiques. Les entraîneurs expliquaient un exercice et je comprenais tout de suite. Cette année ce n’est pas ça du tout, avoue candidement la Brossardoise. Il faut que je me concentre. Souvent, je ne comprends pas et je vais derrière les autres pour regarder ce qu’elles font. »

Lorsqu’une athlète s’absente une saison complète, reprendre le rythme est difficile. L’attaquante arborant le numéro quatre chez les Carabins n’a pas joué en compétition pendant huit ans. Consciente qu’elle agît à titre de recrue, elle s’adapte à son nouveau rôle sur le quatrième trio, et ce, même si elle a été habituée à évoluer sur les trois premiers dans le passé.

« Je joue sur la quatrième ligne et en désavantage numérique pour le moment et ça va bien. J’accepte et je prends mon rôle. Je veux l’accomplir pour aider l’équipe à gagner. Nous sommes remplies de talent offensivement. C’est normal que ce soit aux autres de s’occuper de cet aspect », explique Boulanger toute sereine.

Néanmoins, à la fin du mois d’octobre, dans un duel du Mont-Royal à McGill, elle inscrit ses deux premiers filets universitaires en près d’une décennie dans un gain de 2-1.

« Les deux buts contre McGill c’était du bonbon. C’est plaisant de marquer tôt dans la saison. On se débarrasse d’un poids. Je me disais que j’étais partie sur une lancée incroyable et que je n’allais pas arrêter de marquer et ça n’a pas été le cas, blague-t-elle. On attend toujours le troisième but. »

Vivre l’expérience du hockey professionnel

En 2005-2006, Boulanger débute sa carrière collégiale. Elle participe aux premiers coups de patin du programme de hockey féminin au Cégep Édouard-Montpetit. Le conte de fées va plus loin pour la Brossardoise, lors de sa deuxième année postsecondaire. Pendant deux saisons, âgée de 18 ans, elle goûte au hockey professionnel féminin en évoluant pour les Stars de Montréal, l’ancêtre des Canadiennes.

« Je n’étais pas nécessairement prête à jouer dans la ligue professionnelle, mais à l’époque, nous étions comme des clubs-écoles, se remémore la principale intéressée. Il y avait une alliance avec les cégeps et les Stars où certaines filles collégiales signaient des contrats pour disputer des rencontres avec Montréal. »

Chez les professionnelles, elle côtoie de grands noms en faisant notamment équipe avec une certaine Marie-Philip Poulin. Toutefois, c’est la gardienne de but, Kim Saint-Pierre, qui l’a marquée.

« Avoir Kim Saint-Pierre dans les buts qui te crie des trucs sur la glace, mettons que tu l’écoutes pas mal, s’exclame l’étudiante en kinésiologie. Des fois, on partait sur la route pour aller jouer à Toronto. C’était vraiment spécial. J’essayais d’apprendre au maximum. Dans l’ensemble, j’étais intimidée. »

Dans un tel contexte, l’attaquante des Carabins a retenu l’approche de ces deux hockeyeuses.

« Kim St-Pierre et Marie-Philip Poulin étaient tellement gentilles, se souvient celle qui a joué douze rencontres avec les Stars. Elles nous incluaient et encourageaient afin que nous puissions prendre notre aise. Souvent quand tu n’es pas confortable, tu livres des performances en deçà de tes moyens. L’esprit d’équipe et l’ambiance dans le vestiaire sont primordiaux pour avoir de bonnes performances. C’est ce que je tente de recréer avec les Bleus: d’inclure tout le monde et que toutes sentent qu’il y a un esprit d’équipe. C’est une raison pour laquelle on a du succès et du plaisir à jouer ensemble. »

À 29 ans, Alexandra Boulanger retrouve son titre d’athlète-étudiante. Les Carabins bénéficieront de son deuxième passage scolaire. Pour Alexandra, la fébrilité et le plaisir de jeunesse sont retrouvés. Elle peut vivre pour une seconde occasion sa passion. Surtout, elle replonge dans le bonheur de son premier amour qu’est le hockey.