La fin d’une époque pour trois finissantes
Le printemps pointe tranquillement le bout du nez. Pour des centaines d’athlètes-étudiants des Carabins, l’eau qui ruisselle dans les rues marque la fin de la campagne 2017-2018. Pour des dizaines d’entre eux, c’est la fin d’un parcours de cinq ans au sein du programme de l’UdeM.
C’est le cas pour trois hockeyeuses des bleues. Marie-Pier Chabot, Maude Laramée et Rika Pilon-Robert ont effectué leur dernier tour de glace en mars dernier.
S’étant inclinée contre Concordia en finale provinciale, l’équipe de hockey féminine avait tout de même son billet pour le championnat canadien. Toutefois, une défaite de 4-0 contre Western en levée de rideau du tournoi a empêché aux trois joueuses de cinquième année de toucher une dernière fois à une médaille. Pour ces joueuses, ce revers a été difficile à vivre.
« On a eu des erreurs de parcours. On ne peut pas toujours gagner non plus, a lancé Maude Laramée. Des fois ça va moins bien aller. En quarts de finale, à Western, on a eu des chances de marquer et on n’a pas été capable de conclure. C’est décevant que ça repose sur une rencontre pour accéder à la ronde de médailles. Toutefois, je suis persuadée qu’on avait l’équipe pour gagner. »
De son côté, Rika Pilon-Robert a raconté avoir eu du mal à réaliser que les chances de ressortir avec une médaille au cou étaient inexistantes. Elle est restée plus de 45 minutes dans le vestiaire, refusant de croire que l’équipe n’aurait pas la même chance qu’en 2016.
La meilleure saison à vie
Au-delà des titres, les trois joueuses s’entendent pour dire qu’il s’agît de leur meilleure saison au sein de l’organisation. La cohésion était présente tant sur la glace, qu’à l’extérieur de la patinoire.
« Cette année, on s’entendait toutes bien, c’était une belle chimie, a décrit Maude Laramée. Ce n’était pas seulement à propos du hockey, mais de s’amuser, jouer ensemble et c’était plaisant d’être à l’aréna chaque jour et d’être avec ces filles-là. »
Cette cohésion dans le vestiaire se reflétait sur la glace lors des entraînements.
« On avait toujours du plaisir et on travaillait fort durant les entraînements. Je ne dis pas que je n’ai pas eu du plaisir lors des autres campagnes. Cette année était particulière, a stipulé Pilon-Robert. Même Isabelle l’a mentionné que ce n’était pas comme les autres saisons. De l’extérieur, ça se sentait. Le plaisir et le sentiment d’appartenance étaient très forts. »
Au mois de mars dernier après le tournoi national à London, certaines nouvelles joueuses de l’équipe en ont déposé la cerise sur le sundae.
« La plus belle anecdote cette année, c’est au championnat canadien. Notre gala improvisé par Alexandra Boulanger et Kaleigh Quennec était assez magistral. La réplique du personnel était tout aussi drôle. On a remis certains honneurs un peu drôles et stupides à certaines joueuses. C’était vraiment humoristique et plaisant. Le personnel s’en est donné à cœur joie après le dernier match. C’est drôle de les voir sous un autre jour », a raconté Marie-Pier toute souriante.
Au cours de leur dernière campagne, les trois hockeyeuses ont réalisé que cinq années universitaires ça défile vite. C’est bien loin des trois années collégiales qu’elles ont faites. Lorsque les vétéranes quittent, elles disent aux plus jeunes de profiter de leur dernière année à fond et avec raison.
« Je ne l’ai vraiment pas vu passer même si j’en ai profité. Cette année on est tellement choyées, les finissantes, avec quatre participations au championnat canadien, dont trois médailles. On ne peut pas demander mieux. Il y a des gens qui ne participeront jamais à un seul championnat canadien de toute leur vie », philosophait celle qui a égalisé le record d’équipe d’Elodie Rousseau-Sirois pour le plus grand nombre de victoires établi à 39.
La fin du hockey sur glace compétitif pour deux…
Pour la défenseure Maude Laramée et l’attaquante Rika Pilon-Robert, la rencontre pour la cinquième place à London le 18 mars aura été la dernière. Ces deux joueuses de cinquième année tournent la page à près de 15 ans de hockey compétitif sur la glace.
Dans la situation de l’arrière de 24 ans, la décision a été prise afin de se rapprocher de sa famille. Cependant, elle poursuivra l’esprit de compétition au dek hockey. C’est l’une des façons que ces deux vétéranes ont trouvées afin de faciliter leur transition.
« C’est le seul aspect compétitif qui va me rester du hockey, a soufflé Rika Pilon-Robert. Je fais beaucoup de tournois et ça l’aide. J’ai déjà commencé juste pour vivre mon deuil parce que c’est moins difficile. Ça va m’aider à poursuivre le volet compétitif. »
Le fait de tourner la page sur le hockey universitaire permettra aux joueuses de goûter à un rythme de vie différent.
« J’ai toujours vécu la même routine : hockey, école et travail l’été. Ensuite on recommence : hockey, école et travail l’été, a laissé savoir Pilon-Robert. Ç’a toujours été ça. J’ai hâte d’expérimenter autre chose et de vivre la vie que mes amies vivaient pendant que j’étais dédiée au hockey et aux études. »
L’avenir est incertain pour une autre
Pour Marie-Pier Chabot, la porte n’est ni fermée, ni ouverte. Deux mois de repos l’attendent à l’horizon après plusieurs années à un rythme effréné. L’entraînement physique sera toujours à l’agenda à son retour, mais la suite des choses est incertaine. Une saison post Jeux olympiques complique la tâche quelque peu avec le retour des gardiennes d’Équipe Canada.
« C’est délicat de regarder ça. Mon option numéro 1 ça serait d’essayer les Canadiennes. On verra si je veux continuer à jouer, a expliqué la joueuse de 24 ans. Encore là, ce n’est pas décidé. Je vais essayer de me remettre des deux dernières saisons parce que ça n’a pas été super facile. »
Au passage, la gardienne de but tentera de se dénicher un emploi tout comme ses deux autres comparses. Tandis que le programme en management du sport l’intéresse et que le vieux continent la titille. La native de Québec a des amies qui ont fait le saut, dont l’ancienne capitaine des Ravens de Carleton, Tanya Guindon.
« Je pense un peu à l’Europe, mais je suis un peu « chicken » dans la vie, a reconnu Chabot. Je suis une personne très familiale. Déjà, être à trois heures de ma famille, je m’ennuie beaucoup. J’ai bâti un gros cercle social à Montréal, et là, de tout chambouler… et déménager en Europe? Je ne sais pas si je serais prête à faire ça. Je sais que la ligue la plus forte, là-bas, c’est en Suède. Il faudrait que je sois confrontée à choisir pour me lancer dans le vide ou non. J’ai hâte de travailler et de trouver quelque chose qui va me passionner à l’extérieur du hockey.
D’Ottawa à Montréal
Si la gardienne des Carabins réfléchit à son avenir, la défenseure, Maude Laramée, a dû réfléchir avant son arrivée à Montréal. Elle a changé d’université en cours de route, chose que l’on voit rarement dans l’univers sportif universitaire. Presqu’à l’unanimité, les étudiants-athlètes établissent leurs pénates pendant cinq ans auprès de leur Alma mater. Néanmoins, pour confirmer une règle, il faut une exception et la réalisation de ce cas ne s’est pas faite facilement pour celle qui a arboré le numéro 65 chez les Bleus.
« À Ottawa, j’étais proche de mes parents et je me suis toujours dit que je voulais rester proche de ma famille et de mes amis. Toutefois, si je voulais continuer après mes deux années avec les Gee-Gees, c’était seulement pour jouer avec les Carabins. Quand je suis arrivé ici, c’était difficile. J’ai déménagé, j’étais loin de ma famille et de mes amis, mais je me suis vite adaptée, a avoué l’arrière de 24 ans. Juste le fait de remporter le championnat [Canadien], je me suis dit que j’ai bien fait de passer par-dessus mon anxiété. »
Maude Laramée se situe au premier rang des pointeuses de l’équipe pour les joueuses ayant évolué à la ligne bleue. Elle reprend la 50 vers Gatineau avec une récolte de 34 points chez les Carabins et des amies en plus même si elle se demande ce qu’elle aurait pu faire de mieux.
« Tu regardes ça et tu te dis, cette année, est-ce que j’aurais pu mieux me préparer pour certains matchs? … Disons sortir plus à bloc pour jouer les gros matchs, ça aurait peut-être changé quelque chose. Mais tu ne peux pas revenir là-dessus. Ce qui est fait est fait. C’est sûr que j’aurais voulu gagner, mais on ne peut pas toujours l’emporter. Je pense que les amies que je me suis faites valent plus qu’un championnat canadien.»
Laramée retiendra ses présences au championnat canadien ainsi qu’aux universiades du Kazakhstan en 2017 comme faits saillants de sa carrière.
« Je suis certaine que dans quelques années, je vais regarder derrière et me dire » c’était les plus belles années de ta vie, d’être ici [à Montréal] pouvoir jouer au hockey tout en étudiant »», a précisé celle qui explique que le hockey l’a encouragé à rester sur les bancs d’école.
Le sacrifice des parents
Les trois étudiantes ont eu le support moral et financier de leurs parents tout au long de leur parcours. Les sacrifices ont été nombreux au cours des dernières années, mais ils en valaient la peine.
« Ma mère a été malade à ma première année et jamais je n’ai senti que ç’a affecté le support que mes parents m’apportaient, a expliqué Chabot. Ils ont toujours été mes plus grands admirateurs. Ils sont venus à Calgary pour le championnat canadien. Ça ne les dérangeait pas de ne pas avoir de vacances cette année-là. Pour eux, c’était ça le plus important. Je ne pourrais jamais être assez reconnaissante de tout ce qu’ils ont fait. J’essaie de leur démontrer le plus possible. Clairement, sans eux, jamais je n’aurais pu me rendre si loin. »
Pour Rika Pilon-Robert, la famille a aussi joué un rôle. Ayant été entraînée et initiée par son père plus jeune, elle a dû mettre son pied à terre un jour.
« Mon père a fait la plus grande différence. Avant, il était mon entraîneur-adjoint au hockey mineur et maudit que j’haïssais ça, je n’étais pas capable, a lancé en rigolant l’auteur de 35 points au niveau universitaire. Il a changé pour s’occuper des défenseurs parce que je pognais trop les nerfs après lui. En dehors du hockey, il me conseillait et me suivait tout le temps. Il était fier. Je pense qu’il parle de moi à journée longue encore aujourd’hui au travail, ça n’a pas de bon sens. Au Cégep, mes parents venaient me voir jouer, peu importe où aussi. »
Le dévouement de l’entraîneure-chef
Les joueuses ne se sont pas gênées pour exprimer leur gratitude à l’endroit de l’entraîneure-chef des Bleus. Maude Laramée a raconté qu’Isabelle Leclaire l’a aidé à s’adapter, mais à prendre beaucoup en maturité et en expérience.
« Isabelle est très posée, a pour sa part noté Chabot. Elle m’a aidé à m’adapter à l’université et à comprendre beaucoup de choses. J’ai énormément de respect pour elle et tout ce qu’elle fait pour le programme des Carabins. C’est une personne dévouée et tellement travaillante. »
Puis, l’une des trois joueuses n’a pas l’intention de se distancer de l’entraîneure-chef de sitôt.
« J’ai dit à Isabelle que je ne la lâchais pas et que ça se pouvait que je revienne dans un autre rôle, a indiqué Pilon-Robert, sourire en coin. Elle ne se débarrassera pas de moi facilement. »
En franchissant les portes de leurs pavillons une dernière fois ce printemps et pour des années à venir ces trois joueuses pourront se remémorer, avec fierté, leur médaille d’or de 2016. La neige a beau fondre, la température a beau grimper, mais le ruissellement ne pourra emporter leur médaille et les souvenirs acquis au cours des cinq dernières années. Tout comme le temps d’ailleurs.